Journée d’étude - Méthodes quantitatives dans la recherche sémiotique, 5 février 2016.

Argument
La clé de voûte de l’édifice sémiotique est le texte : ensemble signifiant délimité par l’analyste, sans rapport avec des auteurs ou des institutions qui lui donneraient une « unité de l’œuvre ». Une telle autonomie du sémiotique présente deux défis : Comment vérifier l’exactitude d’une description immanente, l’adéquation à l’objet analysé ? Comment expliquer l’appropriation des systèmes sémiotiques de la part des agents sociaux ? Des défis analogues ont depuis longtemps imposé à la théorie linguistique le concept de corpus. Si le texte naît en sémiotique d’une volonté « centrifuge », qui cherchait à se détacher du sens attribué aux œuvres par la critique traditionnelle, le corpus émerge en linguistique dans le but contraire et « centripète » de trouver un ordre dans des masses de données qui n’ont a priori aucun sens unitaire. La prise en compte des conditions empiriques de production des textes devient nécessaire du moment où on veut justifier l’objectivation d’un corpus.
 
Dans le même temps, divers chercheurs en sémiotique – ou sémiologie – ont entrepris des recherches « hybrides », à la frontière d’autres disciplines comme la sociologie ou la psychologie. Ces recherches se distinguent nettement de la koiné sémiotique (Barthes, Eco, Greimas) particulièrement quand le ou la sémiologue s’approprie certains outils propres à des méthodes traditionnellement quantitatives. Procédures expérimentales ; instruments de mesure, imagerie, visualisation ; enquêtes à large échelle ; procédés statistiques ; outils informatiques ; analyse de grandes bases de donnés textuelles ou multimodales : il s’agit de procédures de textualisation – ou peut-être de pratiques d’émancipation du texte – de plus en plus utilisées pour atteindre les objectifs de la quête du sens. Ces procédures ou pratiques apportent avec elles des nouveaux standards d’évaluation, et un intérêt rénové pour la comparaison et la confrontation interdisciplinaire.
 
Une sémiologie appliquée, qui veut être utile à un plus large public scientifique et professionnel, se trouve à interagir avec d’autres formations discursives (sociologie, psychologie) et leurs objets. En particulier, utiliser des instruments quantitatifs pour réaliser des analyses sémiotiques nous invite à réfléchir sur l’empiricité de la discipline.
Les chercheurs en sémiolinguistique qui utilisent des instruments quantitatifs sont invités à discuter les thèmes suivants :

  • Quelle est l’importance des recherches en psychologie, sociologie, linguistique, analyse de données, pour le développement de la sémiologie ?
  • Comment épouser le savoir faire des statistiques appliquées et le savoir lire de la sémiologie : s’agit-il de deux approches parallèles (quali VS quanti) ou croisées (quali-quanti) ?
  • La réflexion sémiotique peut-elle être bénéfique à l’analyse automatisée de données textuelles complexes (textes, discours, récits) ?
  • Certains instruments mathématiques et statistiques sont-ils plus appropriés que d’autres pour l’analyse du sens ?

 

Programme

9h30
Introduction
Dario Compagno, Université Sorbonne Nouvelle/USPC
 
Ouverture : la dualité quantité/qualité dans les sciences de la culture
François Rastier, CNRS

10h30
Présidence : Jean Petitot, EHESS
 
Morphologie du sens dans le cortex sensoriel
Alessandro Sarti, CNRS-EHESS
 
Méthodes pour l’analyse des images numériques
Everardo Reyes, Université de Vincennes à Saint-Denis
 
11h30 – Pause café

12h
Présidence : Magali Bigey, Université de Franche-Comté
 
Méthodes en sémantique de corpus
Mathieu Valette, INALCO/USPC
 
Une analyse sémiodiscursive outillée des tweets politiques : le corpus Polititweets au prisme de la Théorie des objets discursifs
Julien Longhi, Université de Cergy-Pontoise
 
13h – Pause déjeuner

14h30
Présidence : Maria Giulia Dondero, FNRS-Université de Liège
 
Sémiotique et sciences sensorielles. Entre textes et nombres
Sara Spinelli, Université de Bologne
 
Experimental Methods in Cognitive Semiotics
Riccardo Fusaroli, Université de Aarhus
15h30 – Pause café

16h
Présidence : Marta Severo, Université Charles de Gaulle Lille 3
 
Approche sémiopragmatique « quali-quanti » de l’identité numérique
Fanny Georges et Lucien Castex, Université Sorbonne Nouvelle/USPC
 
De l’observé au déclaratif. Les méthodes numériques et l’enquête en SHS
Julien Mesangeau, Université Sorbonne Nouvelle/USPC et Alan Ouakrat, Université de Lorraine
 
Objectivité et dispositifs numériques. Accès au patrimoine et régimes de croyance
Matteo Treleani, Université Charles de Gaulle Lille 3

17h30
Conclusion